samedi 28 septembre 2013

La tyrannie de l'excellence



assure l'anthropologue belge Paul Jorion.
Quelle que soit la pertinence 
que l'on attribue à cette assertion,
voici, en tout cas, venu 
pour la plupart d'entre nous 
le temps d'un triple constat...
Celui, d'abord, de l'emploi à tout prix.
Celui, ensuite, de l'impératif d'une motivation à tout crin.
Celui, enfin, de «la tyrannie de l'excellence».
Si bien décrite par le philosophe français Michel Lacroix (1)...

En matière de potentiel humain, chacun fait avec ses armes.
Que l'on peut regrouper en deux grandes catégories.
Celle des aptitudes.
Et celle des motivations (1).
Tels sont en effet les deux moteurs de la réalisation personnelle.

Indispensable préalable

Reste, évidemment, à décliner ce postulat.
Côté aptitudes en effet, mes capacités peuvent être réelles ou perçues. 
Et côté motivations, ce que je prends pour mon propre désir n'est souvent que celui des autres, et plus particulièrement celui de mes parents. 
«Cela soulève le problème du travail d'introspection qui est un préalable indispensable à la réalisation de soi, écrit Michel Lacroix (2).
Car mon potentiel ne va pas s'épanouir tout seul...

Il est souvent freiné, entravé, bloqué...
Le grand mérite des spécialistes du développement personnel a été d'attirer l'attention sur ces phénomènes de blocages.
L'outil d'analyse dont ils se servent pour les décrire est le concept de pensée limitante.» (3)

Labourer le champ de la conscience

Les «pensées limitantes» surgissent de façon automatique dans mon champ de conscience.
Mais je peux m'y attaquer afin de les remplacer par des «pensées stimulantes» qui, au lieu d'entraver mon potentiel, le libéreront.
«De sorte que le travail sur soi préconisé par le développement personnel, se déroule, logiquement, en deux étapes: 
. en premier lieu, un travail de déprogrammation mentale, 
. en second lieu un travail de reprogrammation mentale visant à installer ces pensées stimulantes, facilitantes, libératrices.»  (3)
Cette démarche, c'est ce qu'on appelle la «pensée positive».

Halo ? Mais halo, quoi....

Une question se pose pourtant...
Choisit-on vraiment d'être motivé? 
On peut «faire effort», oui. 
On peut travailler sur soi, certainement. 
Mais le moment venu, n'est-on pas contraint de chercher à changer d'approche et/ou d'orientation... en espérant que la vie et les circonstances (voire l'entourage) y autorisent, ce qui n'est pas toujours le cas? 
Attention, donc, à ce que Lacroix appelle «la tyrannie de l'excellence»...
«Le potentiel humain est une idée riche et stimulante.» (4)
Mais il «reste, à bien des égards, une notion floue. 
De multiples interrogations surgissent à son sujet. 
Par exemple: le potentiel est-il présent dès la naissance dans la constitution héréditaire de l'individu, ou bien est-il le fruit du milieu familial, éducatif, social?
Est-il inné ou acquis?
Avons-nous tous les mêmes capacités, les mêmes ressources?
Anthony Robbins, un des chefs de file du développement personnel aux Etats-Unis, assure que "chacun de nous peut devenir un sportif de haut niveau, un chef d'entreprise, un savant, un musicien".
C'est vite dit!
Cette affirmation ressemble plus à un slogan publicitaire conçu pour attirer les clients qu'à une assertion scientifique.
Ne nous le dissimulons donc pas: il y a autour du potentiel un halo d'incertitude.» (5) 

Bien médiocrement acquis ne profite jamais

On comprend, dans ces conditions, que le potentiel humain puisse aisément conduire à des excès. 
La réalisation de soi, alors, cesse d'être simplement une invitation pour prendre le visage désagréable de l'injonction. 
Or, dans le même temps, elle propose des objectifs trop élevés qui, loin d'améliorer la situation psychique de l'individu, contribuent à l'aggraver.
«Au XIXe siècle, l'individu était préoccupé, voire obsédé, par l'opposition du Bien et du Mal, considère Lacroix. 
La situation psychique de l'individu du XXIe siècle est fort différente.
L'individu actuel craint moins de transgresser les interdits que de ne pas être à la hauteur des exigences, souvent exorbitantes, qu'il s'impose à lui-même. (...)
Il est tourmenté à l'idée de rester en deça de ses possibilités. (...)
Il craint de ne pas répondre à l'image idéale d'un être performant, toujours jeune, toujours en forme, optimiste, positif , "au top", capable de relever tous les défis professionnels. (...)
Jadis, l'opposition Bien/Mal était prédominante.
Aujourd'hui, l'opposition Excellence/Médiocrité a pris le relais.
(...)
L'individu du XIXe était persécuté par son surmoi.
L'individu du XXe est persécuté par son idéal du moi.» (6)
Tel est devenu le monde occidental.
En particulier pour ce qui est du travail...
Un univers où le possible se fait impératif.
Et même, souvent, insuffisant... 

C.E.

(1) L'idée, dans ce message, n'est pas d'approfondir le concept de motivation au-delà de ce qu'en écrit Michel Lacroix. Permettons-nous cependant d'esquisser ici qu'il peut faire écho à l'intérêt-convoitise (qui renvoie à un ego socialement négatif et donc demande à être régulé), mais aussi à l'intérêt-curiosité (qui, relevant de la singularité socialement positive, est à préserver)
(2) Le Français Michel Lacroix est agrégé de philosophie, maîttre de conférence des Universités et spécialiste du développement personnel.
(3) Lacroix Michel, Philosophie de la réalisation personnelle. Se construire dans la liberté, Paris, Robert Lafont, 2013, pp.55-56. 
(4) Lacroix Michel, idem, p.60.
(5) Lacroix Michel, idem, pp.44-45.
(6) Lacroix Michel, idem, pp.62-63.







Limiter au maximum les licenciements 


L’Allemagne a connu en 2009 une crise économique deux fois plus grave que notre pays. 
Pourtant, malgré un choc économique 2 fois plus fort, le chômage a augmenté 6 fois moins en Allemagne qu’en France (1)

Comment expliquer ce «miracle»? 
Les syndicats allemands sont allés voir Angela Merkel pour exiger que le licenciement devienne un dernier recours et que la règle générale soit de garder le maximum de salarié(e)s, le maximum de compétences, dans l’entreprise en développant le Kurzarbeit. 

Le Kurzarbeit? 
Le principe est très simple: au lieu de licencier 20 % des effectifs, une entreprise qui voit baisser son chiffre d’affaires de 20 % va baisser son temps de travail de 20 % et garder tous les salariés. 
Le salaire baisse mais l’Etat maintient le revenu. 
Et cela revient moins cher de maintenir le revenu d'un salarié qui baisse son temps de travail que de financer un chômeur si l’on tient compte de tous les coûts induits et les pertes de rentrées fiscales et sociales. 

Le 23 janvier 2011, le Ministère du travail allemand a rendu public un bilan assez complet du Kurzarbeit: il a concerné 1.500.000 salariés qui, en moyenne, ont baissé de 31 % leur temps de travail. 
Si l’on pense que le monde rentre dans une nouvelle récession ou dans une période de croissance très faible, il est vital pour notre cohésion sociale de tout faire pour limiter les licenciements en s’inspirant très vite et très fortement de ce qui a été fait en Allemagne depuis 2008. 
Cela va évidemment à l’encontre du "travailler plus" de Nicolas Sarkozy mais cela peut éviter des centaines de milliers de licenciements. 

(1) L’évolution du chômage est calculée entre le point bas de la courbe (le moment où le chômage commence à augmenter à cause de la crise) et le point haut (le moment où il commence à se stabiliser ou à diminuer). 





Limiter au maximum les licenciements 
en renforçant les mécanismes de sauvegarde de l’emploi 


En 2009, au lendemain d’une crise financière de très grande ampleur, la Belgique, comme l’Allemagne, ont connu une très faible augmentation du chômage et ont assuré un maintien du niveau de l’emploi, alors qu’en Espagne le chômage explosait pour atteindre un quart des actifs et plus de la moitié des jeunes. 

Comment expliquer cette meilleure résistance à la crise en comparaison des autres pays de l’Union Européenne? 

En Allemagne, les syndicats ont limité les licenciements et obtenu le KurzArbeit, dispositif qui permet à une entreprise qui voit baisser son chiffre d’affaires de 20 %, de ne pas recourir au licenciement de 20% de ses effectifs mais de baisser son temps de travail de 20 % et garder ainsi tous les salariés. 
Une contribution de l’Etat compense la perte de salaire et permet le maintien du revenu. 
Il revient moins cher de maintenir le revenu d’un salarié qui diminue son temps de travail que de financer un chômeur. 

En Belgique, l’extension du chômage temporaire déjà en vigueur pour les ouvriers a été étendue aux employés. 
Ce système permet, en cas de baisse d’activité, de suspendre le contrat de travail pendant un certain temps, la rémunération du salarié étant prise en charge par le chômage avec une compensation pour la perte de rémunération payée par l’entreprise. 
Moyennant une faible perte temporaire de salaire, l’emploi a ainsi été sauvegardé. 

En Belgique comme en Allemagne, c’est la dissuasion du recours aux licenciements et la diminution du temps de travail par un système de chômage partiel qui ont permis le maintien de l’emploi et du pouvoir d’achat des salariés pour soutenir l’activité économique.
Il faut donc renforcer ces mécanismes plutôt que de les remettre en question au nom de la course à la compétitivité.   

mardi 24 septembre 2013

Actu. Jeux de pouvoirs


Jeu de 
pouvoir(s). 
Un film de fiction, 
bien sûr.
Mais aussi 
un reportage.
Qui dévoile 
les dessous 
d'un combat. 
Celui qui
oppose 
les mondes bancaire 
et politique
made in Europe.
A (re)voir
intégra-
lement ici (1).

La crise économique de 2008 a montré la fragilité du pouvoir politique face à une spéculation sans contrôle. 
Elle a aussi révélé pour la première fois qu’un État pouvait ne pas rembourser sa dette, exacerbant l’agressivité des marchés.     
 

Lobby soit qui mal y pense

Le 28 juin 2012, en réunion du Conseil européen, les chefs d’État français, espagnol et italien font plier la chancelière allemande: ce sera dorénavant l’Europe qui renflouera les banques et non les États. 
Cependant, Angela Merkel pose une condition: la création d’une union bancaire européenne qui assujettira ces établissements en cas de problème. 
De son côté, François Hollande annonce un projet de loi visant à réguler les activités des banques françaises.
Aussitôt, les lobbyistes multiplient déjeuners informels et interviews pour tenter d’influer sur la rédaction du texte en question. 
Obligeant des députés -emmenés par la dynamique Karine Berger, rapporteur du projet- à lutter pied à pied pour défendre leurs amendements.                                         

Marathons législatifs

Cette enquête nous entraîne au coeur des batailles, feutrées mais sans merci, entre mondes politique et bancaire.  
«C’est eux ou nous», résume le Belge Philippe Lamberts.
Un député vert européen qui, au bout de deux ans de marathon législatif, réussira à faire adopter une directive rendant plus transparente les activités des banques dans les paradis fiscaux. 
Ce mardi soir, sur Arte, gros plan sur une interminable série de petites victoires et de coups fourrés.
Eclairage de ces acteurs clés du dossier que sont le président François Hollande, le président de la commission européenne José Manuel Barroso, le commissaire européen Michel Barnier ou le président du Parlement européen Martin Schulz.
Rencontres avec des journalistes, experts et responsables bancaires.
Et découverte de ces tractations internes qui, dans les coulisses tortueuses de l'Assemblée nationale, de Bercy ou de Bruxelles, aboutissent parfois, grâce à la détermination de quelques-uns, à reprendre la main face à la puissance et à l'arrogance du monde financier.

(1) Ce reportage a été diffusé sur Arte, ce mardi 24 septembre, donc, à 20h50. Il sera rediffusé sur cette même chaîne le lundi 07 octobre à 08h55.


samedi 21 septembre 2013

La finance impose ses règles ? Changeons les !



Les réformes 
financières
mises en place 
depuis la faillite 
de Lehman 
Brothers ?
Insuffisantes, 
affirme-t-on 
chez
Finance Watch.
Qui en appelle 
à une approche 
différente.
Histoire 
de conjurer 
le (gros) risque 
d'une nouvelle crise.
Et de restaurer 
la confiance 
du citoyen.


Cinq années après la chute de Lehman Brothers (1), le système financier n'a pas été transformé.
Les banques et marchés de dérivés? 
Plus imposants que jamais.
Les manipulations?
Toujours épinglées par les journaux.
L'investissement productif?
L'exception plutôt que la règle. 
Et le risque systémique que les banque européennes font peser sur la société d'apparaître dans toute sa persistante actualité (2).
Plus important, même, qu'il ne l'était en septembre 2008. 

Au service de la société

N'est-il pas plus que temps de passer à autre chose?
Si, assure-t-on chez Finance Watch (3).
Une association qui entend défendre l’intérêt public en matière de réglementation financière.
Et qui vient de lancer une campagne d’information appelant le grand public à s’engager en faveur du changement... (4)

Changement: dépasser l'alibi pour éviter l'hallali

Changer les règles de la finance. 
Tel est l'objet de la campagne que vient de lancer l'a.s.b.l. en question.
Il s'agit d'abord d'alerter sur le fait que, cinq ans plus tard, le monde financier s'apparente toujours à un système à haut risque. 
Puis de proposer des solutions fondées sur des analyses-maison.
En invitant le public à les soutenir (5) afin d’éviter que l’Histoire ne se répète. 
«Malgré les efforts consentis en matière de réglementation, le danger d’une crise majeure n’a pas été écarté, regrette le Secrétaire Général Thierry Philipponnat. 
Et les réformes financières du G20 n’ont pas suffi à remettre l’industrie financière au service de la société.
D'où notre campagne.
Qui ne se contente pas d'expliquer ce qui s'est passé en une demi-décennie. 
Mais qui le fait dans des mots simples, étayés par des chiffres et appuyés sur des faits concrets.
Et qui précise en quoi le grand public peut participer, en exigeant des changements qui empêcheront une résurgence de la crise

Lobbyiste vs citoyen

«Des milliers de pages ont été écrites, ajoute l'Analyste Senior Benoît Lallemand.
De là une réglementation complexe qui couvre la plupart des domaines que le G20 s’était engagé à réformer.
La qualité n'est cependant pas à la mesure de la quantité.
En particulier parce que la voix de l’industrie financière domine toujours le processus de réforme. 
Il est donc urgent de définir une liste d’objectifs clairs...
Des objectifs dictés par l’intérêt public. 
Des objectifs définis avec la société civile.
Des objectifs mesurés par des indicateurs transparents. 
Il convient d’inscrire un maximum de citoyens dans cette voie. 
Et de proposer un agenda révisé qui permette de restaurer la confiance.»
A la société et non plus aux banques, désormais, d'écrire les règles de la finance.
Sous peine de ne jamais arriver à (re)trouver un système qui soit à la fois sûr et au service de tous...

C.E.

(1) Le quinze septembre 2008.
(2) Un rapport du Financial Stability Board du 5 septembre 2013 expose en détails ce qui a été accompli en termes de réformes financières internationales. Le FSB déclare que le problème des banques too-big-to-fail n’a pas encore été résolu et encourage vivement les dirigeants à s’atteler à des réformes mettant fin à ces banques géantes, réglementant le shadow banking et sécurisant les marchés de produits dérivés. 
(3) Les élections au Parlement européen, où se joue une part essentielle du processus de réglementation financière, auront lieu du 22 au 25 mai 2014. 
(4) Finance Watch organise à Bruxelles une conférence le 7 novembre 2013.
(5) Le public peut rejoindre les 6 500 personnes qui soutiennent déjà l’action de défense de l’intérêt public dans la réforme financière menée par Finance Watch en s’inscrivant sur le site




Dégager de nouvelles marges de manoeuvre financières 
en créant un impôt européen sur les bénéfices des entreprises 


Le taux d’impôt sur les bénéfices des entreprises n’est que de 25 % en moyenne en Europe contre 40 % aux Etats-Unis (1)
C’est le monde à l’envers! 
On croyait que les Etats-Unis étaient les plus libéraux mais ils taxent plus que nous les bénéfices des entreprises.
Pourquoi l’Europe a-t-elle un taux aussi faible? 
Depuis l’adhésion de l’Irlande et de la Grande-Bretagne, en 1973, tous les états européens sont poussés au moins-disant fiscal par les états qui baissent leur impôt sur les bénéfices pour attirer les entreprises. 
L'Irlande a baissé son taux à 12 % et tous les états membres ont du baisser leur impôt sur les bénéfices… 
Au niveau européen, le taux moyen d'impôt sur les bénéfices a baissé d'un tiers en vingt ans. 
Ce moins-disant fiscal est l'une des causes importantes de l’endettement public. 

Jamais il n'y a eu autant de bénéfices (plus de 550 Milliards d'euros l'an dernier pour les seules entreprises du DJ Stox 600 (2)) mais jamais l'impôt sur les bénéfices n’a été aussi faible! 

La dernière fois que l'on a connu une telle course au moins disant fiscal, c'était aux Etats Unis dans les années 1920: le Texas baissait ses impôts pour attirer les entreprises. 
Puis c’est la Floride qui baissait l’impôt sur les bénéfices. 
Puis l’Ohio… 
Les entreprises (et leurs actionnaires) profitaient sans complexe de ce dumping fiscal. 
Jusqu’à ce qu’éclate la crise de 1929. 
Les Etats se rendirent compte alors que leurs caisses étaient vides et qu’ils n’avaient pas les moyens d’aider les chômeurs ni de relancer l’activité en augmentant les dépenses publiques! 
Dès qu’il arrive au pouvoir, Roosevelt crée un impôt fédéral sur les bénéfices pour rendre impossible le dumping entre états voisins. 
En Europe au contraire, il n'y a pas d'impôt européen. 
Ce qui favorise grandement le dumping entre voisins. 
Voilà comment nous sommes arrivés à un taux d’imposition 15 points inférieur à celui des Etats-Unis. 
Aucun pays d’Europe ne peut augmenter de 15 points son taux d’impôts sur les bénéfices: s’il est le seul à le faire, les entreprises partiraient toutes dans les états voisins. 
Mais rien ne nous empêche d’agir au niveau européen en créant un impôt européen sur les bénéfices de l’ordre de 15 %. 

21 milliards de marges de manœuvre, chaque année, pour la France 

Pour le moment, l’Europe n’a pas de ressources propres. 
Ce sont les états membres qui versent chaque année de quoi financer son budget. 
Cette année, la France va payer 21 milliards d'euros au budget européen (3)
Si le budget européen était financé par un impôt européen, ces 21 milliards resteraient dans les caisses de Bercy, ce qui diminuerait d’autant notre déficit. 

Quel impôt européen? 

On peut créer un impôt sur les bénéfices des entreprises puisque c'est l'impôt sur les entreprises qui a fortement diminué depuis vingt ans, au profit des actionnaires bien plus que de l'investissement. 
Une éco-taxe permettrait également de renforcer les ressources propres de l'Europe, tout en incitant les entreprises à diminuer leur consommation d’énergie. 
L’idée de créer un impôt européen avait déjà été avancée par Jacques Delors dans les années 1980. 
Après presque 30 ans de réflexion, n’est-il pas urgent de passer à l’action? 
Puisqu’un nouveau Traité doit être négocié d’ici le mois de mars 2012, il doit intégrer la création d’une taxe sur les transactions financières et la création d’un impôt européen sur les bénéfices des entreprises. 
Si le budget européen était financé par un impôt européen sur les bénéfices, la France économiserait chaque année un peu plus de 20 milliards. Si un tel impôt existait déjà, notre déficit public ne serait plus que de 75 milliards, moins de 4 % du PIB. 

(1) Le Monde du 12 avril 2006. Il s’agit là du taux nominal, du taux "officiel". Des deux côtés de l’Atlantique, le taux réel de prélèvement sur les bénéfices est plus faible à cause de multiples exonérations. 
(2) Les 600 plus grandes entreprises cotées d’Europe. 
(3) Inutile de rappeler que nous allons aussi en tirer profits, via la politique agricole, les aides structurelles et les nombreuses politiques européennes dont nous bénéficions. Mettre fin au dumping fiscal en Europe.
 



Mettre fin au dumping fiscal européen
en créant un impôt européen sur les bénéfices des entreprises 


Le taux d’impôt sur les bénéfices des entreprises n’est que de 25 % en moyenne en Europe contre 40 % aux Etats-Unis (1)
C’est le monde à l’envers ! On croyait que les Etats-Unis étaient les plus libéraux mais ils taxent plus que nous les bénéfices des entreprises. 
Pourquoi l’Europe a-t-elle un taux aussi faible? 
Depuis l’adhésion de l’Irlande et de la Grande-Bretagne, en 1973, et l’élargissement à 27, tous les états européens sont poussés au moins-disant fiscal par les états qui baissent leur impôt sur les bénéfices pour attirer les entreprises. 
L’Irlande a baissé son taux à 12 % et tous les états membres ont dû baisser leur impôt sur les bénéfices… 
Au niveau européen, le taux moyen d’impôt sur les bénéfices a baissé d’un tiers en vingt ans. 
Ce moins-disant fiscal est l’une des causes importantes de l’endettement public.

La dernière fois que l’on a connu une telle course au moins-disant fiscal, c’était aux Etats-Unis dans les années 1920: le Texas baissait ses impôts pour attirer les entreprises. 
Puis c’est la Floride qui baissait l’impôt sur les bénéfices. 
Puis l’Ohio… 
Les entreprises (et leurs actionnaires) profitaient sans complexe de ce dumping fiscal. 
Jusqu’à ce qu’éclate la crise de 1929. 
Les Etats se rendirent compte alors que leurs caisses étaient vides et qu’ils n’avaient pas les moyens d’aider les chômeurs ni de relancer l’activité en augmentant les dépenses publiques! 

Dès qu’il arrive au pouvoir, Roosevelt crée un impôt fédéral sur les bénéfices pour rendre impossible le dumping entre états voisins. 
En Europe au contraire, il n’y a pas d’impôt européen. 
Ce qui favorise grandement le dumping entre voisins. 
Voilà comment nous sommes arrivés à un taux d’imposition de 15 points inférieur à celui des Etats-Unis. 
Aucun pays d’Europe ne peut augmenter de 15 points son taux d’impôts sur les bénéfices: s’il est le seul à le faire, les entreprises partiraient toutes dans les États voisins. 
Mais rien ne nous empêche d’agir au niveau européen en créant un impôt européen sur les bénéfices. 

L’idée de créer un impôt européen avait déjà été avancée par Jacques Delors dans les années 1980. 
Après presque 30 ans de réflexion, il devient urgent de passer à l’action! 

Jamais il n’y a eu autant de bénéfices (plus de 550 milliards d’euros en 2011 pour les seules entreprises du DJ Stox 600 (2)), mais jamais l’impôt sur les bénéfices n’a été aussi faible! 

Il est essentiel de veiller à ce que les sociétés payent leur impôt. L’optimisation fiscale doit être combattue. 
Trop de règles existent, il faut simplifier, homogénéiser et rendre efficace l’imposition. 
Trop de grandes sociétés arrivent à contourner l’impôt. 
Il n’y a pas de raison que les PME payent plus que grandes entreprises alors que ce sont elles qui créent les nouveaux emplois! 

En Belgique en 2010 des firmes comme Telenet, Exxon, Arcelor-Mittal, Frère-Bourgeois, Accor Hotels, Belgacom, Solvay, Umicore, BASF ou InBev ne payent pas d’impôts malgré des bénéfices de centaines de millions d’euros. 
Les 1.000 sociétés présentant les plus gros bénéfices ont réalisé un total de 57 milliards sur lesquels elles n’ont payé que 3,3 milliards d’impôts, soit un taux d’imposition d’à peine 5,73 %! 

Le taux effectif moyen d’imposition des sociétés en Belgique a diminué de moitié en dix ans : alors qu’il était de 20 % en moyenne en 2001, le taux d’imposition des sociétés était en-dessous des 10 % en 2009. 

Concernant les intérêts notionnels, plus d’une société met sur pied des constructions dans le seul objectif d’éluder l’impôt. 
Dans la plupart des Etats membres de l’UE, l’impôt des sociétés tend à favoriser le financement des investissements par endettement plutôt que par fonds propres, puisque les intérêts sur les emprunts sont déductibles. 
Il y a donc une logique économique à vouloir corriger ce biais. 
Toutefois, la loi belge sur les intérêts notionnels, mal conçue, a permis de nombreux abus, notamment des constructions dans le seul but d’éviter l’impôt. 
Lors de l’introduction de la mesure, le coût budgétaire était estimé à environ 500 millions euros. 
Il serait en réalité plus proche de 2,4 milliards. 
Il ressort des études auprès des entreprises belges que si les intérêts notionnels n’ont pas suscité d’investissements significatifs ni en terme de développement de l’entreprise, ni en terme d’emplois, l’introduction des intérêts notionnels a eu comme seule conséquence d’augmenter encore plus les bénéfices des entreprises en diminuant leur taux implicite d’imposition. 

(1) Le Monde du 12 avril 2006. Il s’agit là du taux nominal, du taux « officiel ». 
Des deux côtés de l’Atlantique, le taux réel de prélèvement sur les bénéfices est plus faible à cause de multiples exonérations. 
(2) Les 600 plus grandes entreprises cotées d’Europe.