vendredi 29 août 2014

Courants de pensée et modes de vie émergents (51) Stop ou encore ?


 
















La crise enferme, certes.
Mais elle libère, aussi.
Car autant elle prive de ressources,
autant elle contribue à ouvrir les esprits
Donc à faire jaillir les idées nouvelles.
C'est dire si, plus que jamais, 
les courants de pensée et modes de vie émergents
se retrouvent à la croisée des chemins.
Sans doute ont-ils déjà commencé
à élever significativement les niveaux conscience.
Reste à réussir dans une entreprise 
encore (beaucoup) plus ambitieuse:
celle de la convergence.


«Imagine qu'il n'existe
aucun paradis
- c'est facile, 
il suffit d'essayer-,
aucun enfer 
en-dessous de nous
et, au dessus de nous, 
seulement le ciel.

Imagine 
 que chacun d'entre nous
se mette à vivre 
pour aujourd'hui...

Imagine qu'il n'existe pas 
le moindre pays
- ce n'est pas si difficile à faire-,
pas la moindre cause pour laquelle tuer ou mourir,
pas même la moindre religion.

Imagine 
que chacun d'entre nous
se mette à vivre en paix...
 
Tu peux m'accuser d'être un doux rêveur, 
mais je ne suis pas le seul.
J'ai l'espoir 
qu'un jour, tu nous rejoindras
et que le monde vivra uni.

Imagine l'absence 
de possession
- je me demande 
si tu en es capable-,
la disparition du besoin 
de convoiter ou d'affamer,
l'avènement
d'une fraternité humaine.

Imagine 
que chacun d'entre nous
se mette à tout partager,
partout dans le monde...
 
Tu peux m'accuser 
d'être un doux rêveur, 
mais je ne suis pas le seul.
J'ai l'espoir 
qu'un jour, tu nous rejoindras, 
et que le monde vivra uni.»

(Lennon John, Imagine)



La conjoncture incite pour le moins à la morosité.
Pire: à la franche inquiétude. 
A tel point qu'il devient de moins en moins hardi de se demander si, au-delà de la crise économique, il ne convient pas de parler de crise de civilisation.
Peu importe ici.
Contentons-nous d'avancer l'idée qu'un tel contexte peut influer de deux manières sur l'évolution des courants de pensée et modes de vie émergents
C'est que, d'un côté, la crise tend à «enfermer», dans la mesure où elle prive de ressources.
Tandis que, de l'autre, elle laisse entrevoir une propension à «libérer», au sens où elle ouvre les esprits à des solutions nouvelles. 

Le moment ou jamais? 

Entre ces deux options, le coeur de Matthieu Ricard ne balance pas.
«La crise actuelle me semble être un moment précieux pour remettre en question notre train de vie, affirme résolument le moine bouddhiste français.
Jusqu'alors on ne s'interrogeait pas du tout sur ce superflu qui nous entourait.» (1)
Innovation: différents types de questionnement sont de mise, désormais.
Celui des
«simplicitaires», par exemple.
«La simplicité volontaire, ou sobriété heureuse, ce n'est pas se priver de ce qui est nécessaire pour vivre et de ce qui nous apporte un bonheur véritable -ce serait absurde-, mais se débarrasser du superflu, et ainsi renoncer aux causes de la souffrance.» (2)
Y renoncer.
Ou plutôt, donc, s'en libérer.
Car «L'oiseau ne "renonce" pas à sa cage, il s'en libère.» (3)

Mouvement de libération... occidental

Un tel «mouvement de libération» (!) se généralisera-t-il?
L'avenir le dira.
Mais, le cas échéant, il devrait prendre une double forme.
. Il passera, tout d'abord, par une élévation de conscience.
«Quand quelqu'un gravit une montagne, cela lui demande un effort, ses jambes fatiguent, mais le paysage s'élargit, devient de plus en plus intelligible, élucubre joliment le «paysan-philosophe» d'origine algérienne Pierre Rabhi. (...)
En élevant notre conscience, on peut voir la relation entre les éléments constitutifs d'une réalité plus large qui ne comporte aucune division.» (4)
. Le mouvement en question se fera également par la culture
Celle-là même à laquelle le sociologue américain James Jasper donne un rôle central quand il la définit comme une «toile de significations» (5) dont les fils renverraient à des idées, traditions, principes moraux, métaphores et autres croyances confuses.
Cocon de sens enveloppant individus et groupes, la culture modèlerait l'action collective et contribuerait à fixer des identités.
Sans, donc, se confondre avec les cadres, «efforts conscients de groupes ou de recruteurs pour adapter leur rhétorique et leurs dossiers de telle sorte qu'ils soient attractifs pour des recrues potentielles.» (5)

Incarner l'utopie

Le changement authentique, écrivions-nous précédemment, ne va pas sans un double questionnement radical, sur soi-même d'une part, sur la société d'autre part.
Encore convient-il de ne pas s'arrêter en si bon chemin.
Encore convient-il de passer à l'action.
Encore convient-il d'incarner l'utopie.
«L'alternative est là, reprend Rabhi.
Soit on reste dans le conformisme du "on ne peut rien changer", soit on le transgresse pour aller vers le changement.» (6) 
Un changement qu'il reste à construire.
Qui plus est en commun.  
Ce qui suppose de convaincre.
Donc, au préalable, de travailler sur les représentations pour donner au mécontentement un langage.
«Ce recours au langage comporte une dimension cognitive en apportant les mots, les classements, les explications qui ordonnent le monde, analyse le sociologue français Erik Neveu. (...)
En désignant des causes et des responsables, la dimension symbolique est aussi normative. 
Elle dit le bien et le mal, le nous et le eux et comporte aussi par là une composante identitaire. 
Enfin, en rendant possible la formulation des griefs et des demandes, elle ouvre un registre expressif.» (7)

Mobilisation générale!

Convaincre, donc, pour mobiliser.
Et, de là, pour converger.
Un ultime mais essentiel défi qui, à ce stade en tout cas, n'est pas près d'être gagné. (8)

Christophe Engels


(1) Ricard Matthieu, Demain, un monde d'altruistes, in Se changer, changer le monde, L'iconoclaste, Paris, 2014, pp.127-128.
(2) Ricard Matthieu, idem, pp.127-128.
(3) Ricard Matthieu, idem, p.128. 
(4) Rabhi Pierre, Ensemble, faire germer le changement, in Se changer, changer le monde, L'iconoclaste, Paris, 2014, pp.160-161.
(5) Jasper Karl, The Art of Moral Protest: Culture, Biography and Creativity in Social Movements, Chicago University Press, Chicago, 1997.
(6) Rabhi Pierre, ibidem, p.169.
(7) Neveu Erik, Sociologie des mouvements sociaux, La Découverte, coll. Repères, Paris, 1996-2011, pp.99-100.
(8) Pour suivre (sous réserve de changement de dernière minute):
. le cinq centième message de Projet relationnel,
. des analyses sur l'immigration, puis sur la social-démocratie et l'écologie politique (après le libéralisme ainsi que l'humanisme démocratique qui, pour rappel, ont d'ores et déjà été abordés). 

1 commentaire:

  1. Aux autorités russes et ukrainiennes, via leurs ambassades.



    Bonjour.



    Permettez-moi de vous exprimer, en tant que citoyen européen, mon immense préoccupation par rapport au conflit qui se trame à l'Est de l'Ukraine. Cela me donne une très grande tristesse.



    J'ai du mal à comprendre que 2 peuples frères, si proches l'un de l'autre, par l'histoire et l'usage d'une langue slave, arrivent ainsi à s'entretuer, avec pour victimes de nombreux innocents, d'Ukraine et de toutes nationalités, par ailleurs.



    Quel est le sens de la citoyenneté qui fait que des compatriotes ukrainiens utilisent la destruction pour faire entendre leur voix. Où sont les citoyens russes et ukrainiens qui plaident pour une paix juste et durable en Ukraine ?



    Quel monde voulez-vous inventer demain en Ukraine orientale ? L'image du monde que vous voulez construire n'est pas très compréhensible: des morts, des blessés des destructions, des humiliations… Soit beaucoup, beaucoup de souffrances. Là où il n'y a pas de vision, le peuple périt. Quelles sont donc les visions des autorités russes et ukrainiennes ? Quel sens de la nuance ont-elles pour un vivre ensemble respectueux des citoyens de cette région ?



    Puisque le conflit institutionnel a été mis entre les mains de forces armées, il convient de s'interroger sur l'ardeur des diplomates russes et ukrainiens à agir pour la paix dans cette région. Où sont et quels sont les travaux institutionnels des autorités russes et ukrainiennes pour permettre de fonctionner pacifiquement sur place ? Y a-t-il une volonté et une connaissance suffisante pour mettre en place des outils pour désamorcer la crise ? Nous en sommes à 2.200 morts aujourd'hui… sans compter les autres victimes.



    En d'autres termes quel est le niveau de victimes requis pour que les acteurs institutionnels puissent enfin vraiment travailler ? Quel est ce niveau de victimes où les ardeurs militaires se tairont enfin ?



    N'y a-t-il pas aussi suffisamment d'acteurs politiques pacifiques en Ukraine et en Russie qui pensent qu'on peut mieux faire que se taper dessus ? En tout cas, je suis reconnaissant à tous ceux qui tentent des médiations de paix dans ce conflit, en particulier Mme Merkel et les autorités françaises pour leurs implications à ce niveau.



    Pour conclure, l'histoire montre que tout conflit doit connaître une fin. Il faut donc se hâter pour se diriger vers une résolution pacifique. En termes de gestion publique moderne, on parle d'une solution win-win.



    Je vous prie de croire, Mesdames, Messieurs, à l'assurance de ma sincère considération.



    Eric Watteau

    Citoyen du monde

    Belgique.

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